Les cinq choses à savoir concernant la mort des poissons du Vietnam

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L’affaire des poissons morts inonde l’actualité. Toute l’information, les hypothèses et l’indignation peuvent prendre de l’ampleur, alors permettez-moi de résumer la situation en cinq points principaux.

1. Des millions de poissons sont morts le long des côtes du centre du Vietnam.

Cause : inconnue / Soupçons : en nombre

Début avril, des pêcheurs locaux remarquaient que les plages de la province de Ha Tinh étaient couvertes de poissons morts. Très vite, de nombreux autres cas sont apparus et des rapports parus dans les médias estiment maintenant que plus de 70 tonnes de poissons morts se sont échoués le long des côtes des quatre provinces du centre du Vietnam. Les cadavres de toute la faune marine – des palourdes mais aussi une baleine – ont jonché 125 miles de côtes.

À ce jour, le gouvernement n’a donné aucune explication quant aux raisons de cette catastrophe, mais cela n’empêche pas les gens de parler. Les journalistes citoyens, les scientifiques et ceux qui sont le plus touchés – les -pêcheurs et leurs familles – ont fait cause commune pour trouver des réponses. Même les médias d’Etat se posent des questions.

Les doigts pointent vers Formosa Hà Tĩnh Steel Corporation, l’accusant de rejeter ses déchets toxiques dans l’océan.

La crise met en avant les craintes du peuple vietnamien s’agissant de la dégradation de leur environnement, de la sécurité alimentaire, et de la réglementation régissant les entreprises qui est laxiste ou inappliquée. Ceux qui vivent de l’eau et du poisson sont les premières victimes de cette catastrophe écologique.

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2. Formosa a pour coutume de polluer l’environnement

Alors qu’aucun lien avéré entre les eaux usées de Formosa et la mort des poissons n’a été établi, les locaux pointent une foule de preuves circonstancielles.

Selon le journal Lao Động, le 4 Avril un plongeur local trouvait un tuyau d’évacuation de l’aciérie rejetant une eau jaunâtre. Deux jours plus tard, les premières vagues de poissons morts commençaient à arriver sur les côtes, et les habitants remarquaient une substance jaune dans l’eau de mer. Plus tard en Avril, le journal Đạt Việt rapportait que des plongeurs travaillant pour Formosa avaient été hospitalisés après avoir plongé dans l’eau près de l’usine. Un des plongeurs est décédé.

Chu Xuân Phàm, le porte-parole de Formosa a tout fait basculer lors une interview avec VTC14, quand le journaliste lui a fait part des observations de nombreux pêcheurs locaux : Les eaux qui autrefois regorgeaient de poissons étaient aujourd’hui dépourvue de toute vie marine depuis l’arrivée du système de traitement des eaux usées. Sa réponse a enragé beaucoup de monde.

“Plusieurs fois au cours de leur vie, les gens font face à des choix : soit attraper et vendre du poisson soit développer l’industrie sidérurgique. On ne peut avoir les deux.”

Phàm a été licencié quelques jours après l’interview alors que tout le monde au Vietnam déclaraient : “Tôi chọn cá”, qui veut dire “Je choisis le poisson”.

En 2009, Formosa a été épinglée par l’organisme de protection de l’environnement Ethecon pour son comportement s’agissant de l’environnement, notamment pour le dumping de produits chimiques dangereux dans le Mississippi, et le rejet de mercure dans le port d’attache au Cambodge.

3. Des citoyens en colère agissent tant sur le net que dans la rue

Les griefs des citoyens au cours de cette crise vont de la frustration à cause du manque de prise de responsabilité à une peur réelle pour leur survie.

Un pêcheur local s’en est pris aux fonctionnaires, déclarant à la chaîne de télévision Saigon Broadcasting Television Network que la vie du peuple vietnamien ne valait rien pour le gouvernement.

“Des gens sont morts, des poissons sont morts. Et à ceux d’entre nous qui sommes vivants, on nous dit “baignez-vous dans l’eau, mangez du poisson, il n’y a pas de problème. Apparemment, ils ne nous considèrent pas comme des êtres humains mais comme des animaux. Ils veulent que nous mourions avec le poisson. Pour eux Formosa est un dieu. Les investissements étrangers ne profitent qu’à eux dans leur ensemble et en tant qu’individus.”

Les médias sociaux ont explosé au cours de la crise. Une pétition intitulée “Nous le peuple” demandant à ce qu’une ‘enquête soit menée a récolté plus de 100.000 signatures en 48 heures, juste avant la visite du Président Obama au Vietnam. Les actions sur le net ont pris feu, mais aussi les actions de rue.

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Des manifestants défilent dans les rues de la capitale du Vietnam Hanoi.

Des protestations ont commencé à la fin du mois d’avril dans le centre du Vietnam, d’abord à Quảng Bình, puis à Huế. Ensuite, la semaine dernière, à Saigon et à Hanoi, des milliers de personnes sont descendues dans les rues pour exiger des réponses, une prise de responsabilité et plus de transparence.

Deux célèbres anciens prisonniers de conscience, Trương Minh Tam et Chu Manh Son, ont été arrêtés alors qu’ils tentaient de faire un rapport sur la crise. Tous deux ont été libérés.

Le week-end dernier, les citoyens sont une nouvelle fois descendus dans les rues pour manifester. Dimanche, les manifestations à Hanoi et à Saigon ont été réprimées en une heure. Des dizaines de manifestants pacifiques ont été jetés dans des cars de police et envoyés dans des centres de détention. D’autres ont été divisés avec force, pulvérisés de poivre, et frappés.

4. Aucune réponse de la part du gouvernement vietnamien

Le Ministre de l’Environnement Trần Hồng Hà a déclaré que le tuyau d’évacuation était illégal après l’examen par des fonctionnaires des échantillons d’eau autour du site, mais il n’y a encore eu aucune annonce au niveau national pour établir les causes ou pour appeler à une enquête indépendante. Hà a présenté ses excuses au nom du Ministère de l’Environnement pour sa passivité, mais s’agissant de son assistant ou plus haut dans la hiérarchie, c’est une autre histoire.

Le Secrétaire Général Nguyễn Phú Trọng a été critiqué après avoir rendu visite au Conseil d’administration de Formosa à Hà Tĩnh concernant des projets en cours sans même avoir rencontré les victimes ou répondu publiquement concernant la mort des poissons. Pendant ce temps, le Ministre de l’Environnement adjoint Võ Tuấn Nhân éludait les questions des médias d’Etat.

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Le Ministre de l’Environnement Võ Tuấn Nhân.

5. Panique autour de la sauce de poisson

Suite à un tollé général dû au manque de réponses, dans les provinces du centre, le gouvernement a interdit l’utilisation des poissons morts dans la chaîne d’alimentation humaine ou animale, mais de nombreux habitants craignent que sans aucun contrôle les cadavres soient transformés en sauce de poisson.

Des gens stockent la sauce de poisson, par crainte que les futurs lots portent des traces toxiques. VTV rapporte que pendant plusieurs jours d’affilée un supermarché Coopmart de Đà Nẵng avait vendu tout son stock de sauce de poisson, de sel et de conserves de poisson. Le directeur adjoint du supermarché a déclaré aux médias d’Etat que les achats de poissons avaient stagné et que les gens achetaient maintenant plus de volaille.

Pour les citoyens ordinaires, la demande pour ces produits répond à leur anxiété s’agissant de la sécurité alimentaire, de la santé et de leur bien-être.

Voilà les cinq points à connaitre concernant la crise des poissons morts au Vietnam. Alors que la tension nationale et l’attention internationale prennent de l’ampleur, le gouvernement vietnamien est sous les projecteurs s’agissant non seulement de la façon dont il va traiter la demande du peuple pour désigner les responsables, mais aussi la façon dont il va gérer le tollé public. Et les cris de protestation n’ont pas l’air de faiblir.

L’affaire des poisons morts est devenue une affaire personnelle au Vietnam.

Source : Loa

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